Sororalement

« Fraternellement ». Alors que je griffais mécaniquement cet énième mail pro inutile de la formule consacrée, un reflux rebelle de pensée œstrogénée m’a traversée. Fraternellement ? Vraiment ? Tout ce chemin fait, tous ces efforts, pour n’être qu’un « frère » soluble dans l’universalisme de mes deux (que j’ai toujours, ne vous en déplaise) ?

J’ai un moment hésité à signer « Non, je ne suis pas votre frère, merde » mais j’ai opté par un « sororalement » qui se voulait discret. Je l’ai réutilisé dans toutes mes futures communications jusqu’à ce qu’on le remarque et que cela fasse l’objet de moqueries plus ou moins discrètes.

« Sororalement ». Un néologisme taquin qui aura suffi à énerver quelques réacs chez les gauchistes de pacotille. Et pour moi, une façon polie et détournée de dire « oui, je ne suis pas des vôtres, je ne suis pas un homme, je n’aime pas la compagnie des hommes, et je vous emmerde ». Et après tout, est-ce qu’ils se gênent, eux, pour imposer du « fraternellement » faussement neutre, à tour de bras ?

Au-delà de l’aspect volontairement provocateur de la formule, quand j’écris « sororalement », ce n’est pas vide de sens. Ce n’est pas la répétition d’une répétition d’une répétition d’une expression lue des milliards de fois ailleurs. Le « liberté, égalité, fraternité » récupéré par celleux qui n’en comprennent pas le sens premier et ne sont véritablement ok avec aucun des trois.

Quand j’écris « sororalement », c’est à la fois un signal d’amitié, de force et d’amour à tou·tes les personnes qui se sentiraient concerné·es. Je suis là, je suis visible, rassemblons-nous. Mais c’est aussi un immense « fuck you » à tou·tes les minables qui se sentiraient offensé·es par la puissance de ce mot. Parce que la sororité est une force réelle, elle est une vague, elle leur fait peur. Parce que l’entraide et la compassion ne font plus partie de leur vocable en dehors de leurs tracts pourris. Parce que derrière leur progressisme d’apparat, ils ne supportent toujours pas d’être qualifiés de mecs, de cis, d’être rappelés aux clichés ambulants qu’ils sont bel et bien. Parce qu’ils sont de l’ancien monde et en train de crever, et qu’ils veulent absolument nous faire crever avec eux.

Sororalement, ça veut dire « je ne fais plus partie de votre système ». « Je refuse de crever ». Ça veut dire « Je vous emmerde ». Non… plus que ça. « On vous emmerde ».